Hello à tous
Voici le point du musher sur la course.
Depuis Dawson, tout s’est pas trop mal passé. Dès le départ, Roope a boité. Il semble que ce soit un blocage au niveau des cervicales qui en soit la cause, donc un incident de course.
Nous avons passé facilement les monts King Salomon en début de nuit, puis au lever du jour on a traversé une région de mines d’or avec pas mal de surfaces gelées et pertes de piste, simplement parce qu’il était impossible pour les chiens et pour moi de nous tenir debout.
A plusieurs reprises, il a fallu aller à quatre pattes chercher les leaders et les mettre sur la piste. Une fois, j’ai même dû décharger le traîneau pour l’extraire d’un petit ruisseau gelé et repartir pour 40km jusqu’au checkpoint. Avant ça, on a escaladé une belle montagne signalée comme petite, mais d’où on voyait jusqu’à 500km à la ronde.
Tout le monde avait dit que la piste était facile, j’ai donc préféré faire les 150km d’un coup et arrêter les chiens 12 heures à Scroggie Creek.
La seconde partie de piste qui mène à Pelly Crossing était bonne, mais loin d’être plate et facile comme annoncé. On l’a cependant faite d’une traite. A mi-chemin, j’ai dû me résoudre à charger Roope dans le traîneau, qui boitait trop à mon goût. Donc un effort supplémentaire pour les autres. J’aurais pu le laisser à Scroggie Creek, j’aurais dû le faire, ça a été une erreur d’appréciation que de le garder, mais un vétérinaire de la course m’a laissé le choix, pour lui aussi, Roope pouvait courir. Je suis donc tranquille avec ma décision.
Arrivé à Pelly, j’ai laissé 12 heures de repos aux chiens, mais je pense que les 2 runs de 150km ont laissé des traces dans les organismes.
Ce matin, au départ, les chiens ont démarré normalement, mais on a pris deux fois des mauvaises directions, il a fallu réorganiser le team et ils n’avaient pas la motivation pour arriver à rejoindre Carmaks. J’ai donc décidé de les mettre à l’abri à Pelly et attendre, comme à Forty Miles, qu’ils récupèrent avant de repartir.
Les chiens ont fait une course formidable, je ne peux rien leur reprocher. On a collé à notre stratégie de course et ça nous a menés jusqu’ici, et c’est déjà très loin. L’euphorie de Dawson fait place à un nouvel état d’esprit, un peu moins joyeux, mais on a déjà fait face, eux et moi, à ce genre d’obstacle.
Je savais que la fin de course serait certainement pas la plus facile. Une nouvelle phase commence, qu’il va falloir gérer avec philosophie et calme.
Tous les chiens vont bien. Les vétérinaires de course les ont vus et ont attesté de leur bonne santé. Ils mangent énormément et ont besoin de dormir ensuite. Ca ira certainement, je suis confiant.
La Quest reste un monument pour moi. Je savais que ça ne serait pas facile, j’étais prévenu et préparé. Pas de regrets. Juste maintenant l’envie de continuer et d’avaler le reste des kilomètres qui nous séparent de l’arrivée.
Connaissant mes chiens, j’avais prévu la chose. Les trois derniers checkpoints sont pourvus en nourriture pour les chiens et moi de façon à faire un à trois jours de pause s’il le faut. Tout est donc en place pour nous permettre de rallier l’arrivée, peut-être tard, mais la rallier par tous les moyens en ma possession.
Je m’étais mentalement préparé à faire la course à la dernière place dès le départ. On a fait une course formidable jusque là, incroyable pour moi quand je regarde les résultats. Si la fin devait être moins bonne, ça ne gâcherait en rien ma course.
On est venus pour la terminer. Le but reste le même, et il est réalisable. Ce qu’il faut savoir, c’est que sur la Quest, il n’y a pas de dead line, on peut arriver quand on veut, le record est de 20 jours et peut être battu, donc pas de raison d’être déçu.
Ici, finir la Quest a une signification particulière. Finir, quelque soit le temps, est considéré par tous comme une performance, en particulier pour moi.
Tout ça fait partie intégrante du voyage en traîneau pour Whitehorse.
Voilà. Désolé pour les supporters qui pensaient qu’on allait gagner, mais ils n’étaient pas nombreux…
Merci à tous de nous suivre.
Pierre-Antoine Héritier, musher motivé…
